Lionel Sabatté
Interfaces mouvantes
Moving Interfaces

Depuis plus de vingt ans, Lionel Sabatté (né en 1975 à Toulouse, France) s’intéresse à l’impact du temps sur les mondes minéral, organique et animal, explorant les flux d’énergie entre l’extérieur et l’intérieur d’un corps. Par le biais de réactions chimiques, en particulier l’oxydation, sur des matériaux inhabituels, il rend perceptible et sublime ce qui est habituellement voué à l’invisibilité.
Poursuivant son bestiaire de figures hybrides, l’artiste utilise de la pouzzolane, une poudre de roche volcanique poreuse, pour façonner des créatures préhistoriques et aveugles qui, tel le Phénix, renaissent de leurs cendres. Ses peintures monumentales, mêlant du tissu de soie et différentes dilutions de liquides, évoquent des paysages d’une autre planète. Elles tissent une dialectique entre l’éphémère et l’intemporel, le vivant et l’inerte. Les oiseaux sculptés en bronze, intitulés Inséparables solitaires, se libèrent de leur ancrage terrestre pour prendre un envol collectif.
L’œuvre Le Tissu, réalisée à partir de peaux mortes collectées auprès de podologues, rassemble en une seule entité d’innombrables fragments de corps différents. La peau étant la membrane sensible qui nous relie au monde, l’œuvre s’inscrit à la lisière entre le soi et l’autre. De même, les visages créés à partir de poussières (cheveux, fibres de vêtements, etc.) ramassées par l’artiste dans les couloirs du Musée d’Art Moderne, contiennent des milliers de fragments d’ADN que le hasard a réunis pour former un corps uni.

Texte des commissaires Julia Garimorth et Jean-Pierre CRIQUI