POUR UNE UTOPIE DU COMMUN…

Qu’y a-t-il de commun entre un Radeau de Gilles Barbier et une cuillère Léga, un Duo floral subtilement dessiné sur soie par Jessy Deshais et un Masque pendentif du royaume du Bénin ou encore un Dronecast de Nicolas Darrot et un masque de sarcophage égyptien de la XXIe dynastie ?

Il est vrai que les conflagrations d’images surréalistes nous ont rendus un peu plus familiers ces attelages bizarres propres à faire surgir dans l’imaginaire des perceptions nouvelles, des rapprochements a priori incongrus révélant des territoires jusque là inexplorés. Des pratiques héritières des fameux cadavres exquis ont pu, récemment, tracer des lignes de fuite, ou de ruptures, dans la trop sage chronologie des histoires de l’art. Celles-ci mettent ainsi au jour des échos inouïs entre des
esthétiques éloignées dans le temps et l’espace, peu soucieuses des étiquettes et compartiments, en aiguisant l’œil et le désir au contact d’œuvres profondément différentes, bien avant ce qu’il est convenu de nommer la modernité.
En mettant en regard, en réseau, en tissant ensemble des œuvres sans commune mesure, c’est précisément du commun qu’affirme cette vente, à l’horizon d’une communauté à venir. Les liens qui rassemblent des travaux aussi dissemblables, par-delà leurs échos formels aléatoires, forment une sorte de lieu commun qui fut pensé, il y a plus de cinq siècles, par Thomas More lorsqu’il inventa le terme d’utopie : un non lieu qui constitue une impulsion, l’énergie d’un bond vers un horizon commun à construire. Et c’est exactement de cela qu’il s’agit, puisque le fruit de cette vente a pour objet la création d’un lieu à venir, non pas dans un futur « utopique » incessamment repoussé, mais très concrètement à développer dans les mois qui suivront.
Le lieu existe, à deux heures de Paris ; il faut maintenant l’inventer — et c’est ce que cette vente va rendre possible. Inventer le commun par et avec les artistes, les intellectuels, les paysans, c’est s’ouvrir à la reconnaissance active et dynamique des différences irrésolues selon une visée identique. C’est là tout le sens d’une telle archéologie contemporaine : faire lever la faim d’aujourd’hui vers la communauté de demain.

Yannick MERCOYROL
Écrivain et commissaire d’exposition

ARCHÉOLOGIE CONTEMPORAINE

Jeudi 3 octobre 2024 – 18h – Première partie
AFRIQUE – ASIE – ARCHÉOLOGIE – TABLEAUX MODERNES
ART CONTEMPORAIN
Lots 1 à 60
Vendredi 4 octobre 2024 – 14h30 – Deuxième partie
DESSINS ET TABLEAUX ANCIENS
DESSINS ET TABLEAUX MODERNES – ARCHÉOLOGIE
ASIE – AFRIQUE
Lots 61 à 130
Drouot – salle 1

EXPOSITIONS

24, place des Vosges – 75003 Paris

Du mercredi 11 septembre au vendredi 13 septembre de 10h à 18h
Hôtel Drouot
Mercredi 2 octobre de 11h à 18h
Jeudi 3 octobre de 11h à 16h
Téléphone pendant l’exposition + 33(0)1 48 00 20 01